Histoire Complète du Prophète Mahomet (570-632 de l’ère commune)

I. Contexte Historique et Naissance
L’Arabie du VIe siècle est une péninsule majoritairement désertique, organisée en tribus bédouines nomades et en cités-États commerçantes. La Mecque (Makkah) est la cité la plus importante, car elle abrite la Kaaba, un sanctuaire ancien attirant des pèlerins de toute la région et contenant déjà plus de 360 idoles. La société est polythéiste, tribale et marquée par des vendettas, l’infanticide des filles et de fortes inégalités.
Naissance :
Mahomet (Muḥammad en arabe, signifiant « le Loué ») est né vers 570 à La Mecque. Il appartient au clan des Banu Hachim, une branche de la puissante tribu des Quraych, gardienne de la Kaaba. Son père, Abdallah, est mort avant sa naissance. Selon la tradition, sa mère, Amina, l’a confié à une nourrice bédouine, Halima, selon la coutume. À six ans, sa mère meurt, le laissant orphelin. Il est alors recueilli par son grand-père paternel, Abd al-Muttalib, puis, à la mort de ce dernier, par son oncle Abû Tâlib, qui deviendra son protecteur.
II. Biographie avant la Révélation
Avant de devenir prophète, Mahomet est connu à La Mecque sous le nom d' »Al-Amîn » (le Digne de Confiance). Il travaille comme commerçant. Sa réputation d’honnêteté attire l’attention de Khadija, une riche veuve commerçante, qui l’emploie puis lui propose le mariage. Il a 25 ans et elle en a environ 40. Ce mariage sera heureux et marquera le début d’une période stable et prospère pour Mahomet.
Il avait l’habitude de se retirer pour méditer dans une grotte du mont Hira, près de La Mecque, en quête de vérité spirituelle au-delà du polythéisme ambiant.
III. La Révélation et la Prédication à La Mecque (610-622)
À l’âge de 40 ans, en 610, lors d’une de ses retraites, l’ange Gabriel (Jibril) lui apparaît et lui ordonne : ** »Lis ! »**. Terrifié, Mahomet répond qu’il ne sait pas lire. L’ange insiste et lui transmet les premiers versets de ce qui deviendra le Coran (Sourate 96, versets 1-5). Cet événement marque le début de la Révélation qui durera 23 ans.
Khadija est la première à croire en lui, devenant la **première musulmane**. Son cousin Ali (futur gendre) et son ami Abou Bakr (futur beau-père et premier calife) le suivent rapidement.
La prédication initiale est secrète, puis devient publique après trois ans. Le message central est l’**Unicité de Dieu (Tawhid)** : il n’y a de divinité digne d’adoration qu’Allah, et Mahomet est Son Messager. Il appelle à l’abandon des idoles, à la justice sociale, au jugement dernier et à la moralité.
Les notables mecquois, dont la puissance économique et sociale est liée au pèlerinage polythéiste, s’opposent farouchement à lui. Ils persécutent ses disciples, souvent des esclaves et des personnes de faible statut social. Le clan des Banu Hachim, dont fait partie Mahomet, est soumis à un boycott économique et social.
Événements marquants :
L’Année de la Tristesse (619) : Khadija, son soutien indéfectible, et son oncle protecteur Abû Tâlib meurent. Mahomet perd ses principaux appuis.
Le Voyage Nocturne (Isra) et l’Ascension (Miraj) : Sel la tradition islamique, Mahomet effectue un voyage miraculeux de La Mecque à Jérusalem (Isra), puis une ascension aux cieux (Miraj) où il rencontre les prophètes antérieurs et reçoit l’ordonnance des cinq prières quotidiennes.
IV. L’Hégire et la Fondation de Médine (622-630)
Face à l’hostilité croissante, Mahomet et ses disciples cherchent une nouvelle base. Une délégation de Yathrib (future Médine), une oasis déchirée par des guerres tribales, l’invite à venir comme arbitre et leader.
L’Hégire (Hijra), l’émigration de La Mecque à Yathrib en 622, est un tournant décisif. Elle marque le début du calendrier musulman. La ville est renommée Madinat an-Nabi (« La Cité du Prophète »), ou Médine.
À Médine, Mahomet établit la première communauté musulmane (Oumma) structurée, transcendant les liens tribaux. Il rédige la Constitution de Médine, un pacte qui définit les droits et les devoirs des musulmans, des juifs et des autres tribus, formant une sorte de confédération.
Les relations avec les tribus juives de Médine se détériorent progressivement, certaines s’alliant avec les Mecquois. La direction de la prière (qibla) est alors changée de Jérusalem vers la Kaaba à La Mecque.
Conflits avec La Mecque :
Une série de batailles a lieu entre les musulmans de Médine et les polythéistes de La Mecque :
Bataille de Badr (624) : Victoire miraculeuse des musulmans, malgré leur infériorité numérique. Elle est vue comme un signe du soutien divin.
Bataille de Uhud (625) : Revers pour les musulmans due à une désobéissance tactique.
Bataille du Fossé (627) : Les Mecquois assiègent Médine, mais les musulmans, protégés par un fossé creusé autour de la ville, repoussent l’attaque.
Finalement, en 628, Mahomet signe le Traité de Hudaybiyya avec les Mecquois, une trêve apparemment défavorable aux musulmans mais qui s’avère être une victoire stratégique, permettant l’expansion pacifique de l’islam.
V. Les Conquêtes et la Prise de La Mecque (630-632)
En 630, profitant de la violation du traité par une tribu alliée des Mecquois, Mahomet marche sur La Mecque avec une armée de 10 000 hommes. La ville se rend sans combat. Il fait alors un acte de clémence générale, épargnant la plupart de ses anciens ennemis. Il entre dans la Kaaba et détruit les idoles, la purifiant pour le culte d’Allah Unique. Cet événement consolide l’islam comme force dominante en Arabie.
Les années suivantes, les tribus arabes se convertissent en masse et se rallient à la communauté musulmane. Mahomet mène une dernière expédition au nord, à Tabuk, en 631, affermissant l’influence musulmane aux frontières de l’Empire byzantin.
VI. Famille, Femmes et Enfants
Épouses (Mères des Croyants) : Après la mort de Khadija, Mahomet épousa plusieurs femmes, principalement pour des raisons politiques (sceller des alliances tribales), sociales (protéger des veuves de guerre) ou pour enseigner la religion.
Khadija : Son premier amour et soutien. Mère de tous ses enfants (sauf Ibrahim).
Aïcha : Fille d’Abou Bakr. Elle deviendra une source majeure de hadiths (paroles et actes du Prophète).
Sawda, Hafsa, Zaynab bint Khuzayma, Umm Salama, Zaynab bint Jahsh, Juwayriyya, Umm Habiba, Safiyya, Maymuna.
Enfants :
Tous ses enfants sont nés de Khadija, sauf Ibrahim, né de Maria al-Qibtiyya.
Fils : Al-Qasim, Abdullah, Ibrahim (tous sont morts en bas âge).
Filles : Zaynab, Ruqayya, Umm Kulthum, Fatima. Fatima est la plus célèbre, car elle épousa Ali ibn Abi Talib et est l’ancêtre de la lignée des descendants du Prophète (les Chérifs et les Sayyids).
VII. Mode de Vie
Mahomet menait une vie extrêmement simple et ascétique. Malgré son statut de leader, il vivait dans des maisons modestes, raccommodait ses propres vêtements, trayait ses chèvres et aidait aux tâches ménagères. Il était connu pour sa gentillesse, son humour, son humilité et sa justice. Il insistait sur l’importance de la compassion, du respect des parents, de la bienfaisance envers les orphelins et les nécessiteux.
VIII. Miracles
Pour les musulmans, le Coran lui-même est le miracle suprême de Mahomet : son éloquence, sa beauté littéraire inimitabile et ses prophéties. Les autres miracles (appelés Mu’jizât) rapportés dans les traditions (hadiths) incluent :
Le Voyage Nocturne et l’Ascension (Isra et Miraj).
La Scission de la Lune (mentionnée dans le Coran).
La multiplication miraculeuse d nourriture et d’eau pour ses compagnons.
Des guérisons.
IX. Doctrine et Enseignements
La doctrine prêchée par Mahomet est l’Islam, qui signifie « soumission à Dieu ».
Croyance centrale : Tawhid (l’Unicité absolue de Dieu). Rejet de toute association (shirk).
Les Cinq Piliers de l’Islam :
1. Chahada : L’attestation de foi (« J’atteste qu’il n’y a de divinité qu’Allah et que Mahomet est Son messager »).
2. Salat : Les cinq prières quotidiennes.
3. Zakat : L’aumône obligatoire aux pauvres.
4. Sawm : Le jeûne du mois de Ramadan.
5. Hajj : Le pèlerinage à La Mecque au moins une fois dans sa vie, si on en a les moyens.
Sources : Le Coran (révélation verbale de Dieu) et la Sunnah (la tradition du Prophète, compilée dans les hadiths) forment la base de la loi (Charia) et de la morale.
X. Mort et Succession
Mahomet meurt après une courte maladie en 632 (11 Hégire) à Médine, dans les bras de son épouse Aïcha. Il est enterré dans sa maison, qui fait aujourd’hui partie de la Mosquée du Prophète à Médine.
Sa mort provoque une immense stupeur dans la communauté, certains refusant d’y croire. Abou Bakr, son plus proche compagnon, calme la foule en déclarant : « Celui qui adore Mahomet, qu’il sache que Mahomet est mort. Mais celui qui adore Allah, qu’il sache qu’Allah est Vivant et ne meurt jamais. »
L’absence de désignation claire d’un successeur conduit à la nomination d’Abou Bakr comme premier Calife (successeur), mais aussi à la grande scission future entre Sunnites (qui suivent la tradition de la communauté) et Chiites (qui estiment que la succession devait revenir à Ali, son cousin et gendre).
XI. Historique de l’Islam après Mahomet
Les Califes Bien-Guidés (632-661) : Abou Bakr, Omar, Uthman et Ali. Période d’expansion rapide de l’empire musulman (conquête du Levant, de la Perse et de l’Égypte). Compilation définitive du Coran.
Califat Omeyyade (661-750) : L’empire s’étend de l’Espagne à l’Indus. Structuration de l’État.
Califat Abbasside (750-1258) : Âge d’or de la science et de la culture islamique (Bagdad).
Empires successifs (Mamelouks, Moghols, Ottomans, Safavides) et diffusion de l’islam en Afrique, en Asie et dans les Balkans.
Époque moderne : Colonisation, décolonisation, et développement de divers courants de pensée (réformisme, islamisme, etc.). Aujourd’hui, l’islam est la deuxième religion du monde avec près de 2 milliards de croyants
